jeudi 24 mai 2018

MUSIQUE ET MYSTICISME : LE CAS JANKELEVITCH.

Dans sa leçon inaugurale au Collège de France, le pianiste et musicologue Karol Beffa pose cette question : "pourquoi parler de musique ? Ne se suffit-elle pas à elle-même ? En quoi un discours sur la musique permettrait-il de mieux la comprendre ou de mieux l’interpréter ? En quoi permettrait-il de mieux l’entendre et d’en jouir davantage […]. Nombreux sont les courants de pensée qui, au cours des temps, ont considéré la musique comme une forme d’art qui, d’une manière ou d’une autre, excéderait et neutraliserait le langage […]. De nos jours, ces scrupules à discourir sur la musique relèvent plus de la singularité que de la règle. Car c’est à une véritable invasion du commentaire sur l’art que l’on assiste, la musique ne faisant pas exception"(Beffa, comment parler de Musique ?). Or Vladimir Jankélévitch relève, précisément, de cette singularité scrupuleuse qui écrit que "notre curiosité sera déçue si nous en demandons la révélation à je ne sais quelle anatomie du discours musical. Mais si nous convenons enfin qu'il s'agit d'un mystère […] alors nous connaîtrons peut-être ce consentement au charme qui est, en musique, le seul état de grâce"(Jankélévitch, la Musique et l'Ineffable). Nous allons essayer de montrer que, si la logorrhée à propos, tout particulièrement, de la musique est, de loin, le meilleur moyen de décevoir l'amateur de musique, en revanche la considérer comme un mystère requérant un "état de grâce" n'est pas non plus la meilleure manière d'en goûter et d'en faire goûter le "charme".